Histoire

Étymologiquement, il semblerait que La Redorte tienne son nom de l’occitan » Redorta « , c’est-à-dire liens d’osier et, par extension : clôture, haie … Il faut noter que les armoiries de la famille « de Nigri », anciens seigneurs du village, portent sur leur blason » Trois redortes d’or « , à savoir trois chaînes torsadées. Ces armes sont devenues celles de la communauté de La Redorte.
La première mention textuelle de La Redorte remonte à l’an 1080, date à laquelle est évoqué » Redorta « lors d’une assemblée se tenant à Narbonne et à laquelle assistent Bernard Tetmar de Redorta et son frère. La famille Redorta incarne les seigneurs du lieu, de la fin du XIe au début du XIIIe siècle.
En 1216, apparaît dans la localité la Maison » Nigri de Redorta « . En effet, Simon de Montfort donna en fief une partie de La Redorte au dit » Nigro « . Ce dernier rend hommage-lige à Amaury de Montfort, en 1217.

En 1275, est évoquée la » leude » de La Redorte, lieu de péage toujours porté sur les documents cartographiques.
A partir de la fin du XIIIe siècle, la famille Nigri, ne détient que la moitié de la seigneurie de La Redorte, en paréage avec le roi.
Entre le XVe et le XVIe siècle, le nombre de coseigneurs s’accroît considérablement, il est fait notamment mention des Clarmont Auxillons, plus tard des Montbrun, Lévis, en sus des Nigri.
En 1561, le Parlement de Toulouse reconnaît à Pierre Lenoir la possession de la moitié de la seigneurie de La Redorte. Un acte de 1564, fait état des tasques et autres droits que les habitants du village son tenus de payer au Roi et aux coseigneurs. En 1565, Estienne Faure, sieur de La Redorte, est choisi en tant qui Capitaine pour assister à l’entrée de Charles IX dans Narbonne.
Au XVII e siècle, un arrêt de la Chambre des Requêtes maintient à Ia tête du village une certaine Dame Esperonnat, qualifiée de co-seigneuresse.
Au cours de ce même siècle, il est fait état de biens situés sur » Li Redorta « appartenant à l’abbaye de Lagrasse. Un dénombrement de 1770 n’évoque plus aucune possession de cet établissement sur Ie territoire de La Redorte.
A noter un lieu-dit » l’Hôpital « , à l’Ouest du village, qui témoigne probablement de la présence de l’Ordre de Malte, largement représenté en Minervois, mais on ne dispose d’aucune information précise sur la dénomination de ce site.
La famille Nigri est toujours présente au XVIIe siècle en même temps que les Peyrat, dits seigneurs de La Redorte. Ce même siècle sera marqué par le creusement et l’aménagement du Canal du Midi qui s’écoule dans la partie Est de la commune.
Au cours du siècle suivant, on retrouve les Nigri et les Peyrat. En 1722, un certain Pierre Paul de Peyrat rend hommage pour la terre de La Redorte. En 1792, le citoyen Peyrat se plaint de voir stationner devant son château tout le détachement militaire destiné à assurer la libre circulation sur le Canal du Midi. A la même date, il intente un procès à la municipalité qui a fait démolir les mansardes des quatre tours de son château qui » rappelaient la féodalité « . Le citoyen Peyrat est débouté.
Dans le cadre de la rédaction des Cahiers de doléances, la communauté demande l’exemption de la dîme sur les terres défrichées, pour 30 ans encore.
Ce XVIIIe siècle est également caractérisé par des épisodes de grêle et d’inondations qui ruinent les récoltes. En 1730, le diocèse accorde aux consuls de La Redorte 400 livres afin de pallier les dommages causés aux récoltes.
Au début du XIXe siècle, le Général Maurice Mathieu acquiert une partie de La Redorte d’un héritier Peyrat. En 1817, une ordonnance royale l’autorise à ajouter à son nom celui de La Redorte. Ses descendants, militaires pour la plupart, héritèrent du village.
La fin du siècle dernier sera marquée par le passage d’un cyclone en 1887 qui fera six morts et des dégâts conséquents
Enfin, les 12 et 13 Novembre 1999, le Département de l’Aude a été victime d’une de ses plus graves inondations : à La Redorte, la furie des eaux a ravagé la moitié des infrastructures communales, le port sur le Canal du Midi, près de 150 habitations et plus de 250 hectares de vignes.
EDMOND JOUCLA
Edmond JOUCLA, né à La Redorte en 1873. Etudes à Carcassonne et à Toulouse. Docteur en Droit. Diplômé de l’Ecole Coloniale.
A Saint-Pierre de la Réunion il est magistrat en 1899 puis juge en 1902. Ensuite à Dakar, au Sénégal, il est chef de cabinet du Gouverneur jusqu’en 1910. A Paris, au Ministère des Colonies, il est chef de Bureau de 1910 à 1917. A Marseille, Chef du Service Colonial de 1918 à 1925. De retour à Paris en 1926, il est sous-directeur puis directeur du Ministère des Colonies jusqu’en 1935. Il se retire à La Redorte.
Auteur de plusieurs ouvrages dont une Bibliographie Générale des Colonies Françaises de 1904 à 1933, il a aussi fait de nombreuses recherches sur l’histoire du village. Commandeur de la Légion d’Honneur, il était aussi très fier d’avoir été champion d’escrime du Sud-Ouest en 1899 ».
Le Village

Le parcellaire rend compte de cet espace médiéval primitif circonscrit par la rue » du Languedoc « , la rue » de la Cité » et la rue « du Pic de Nore.
Au delà de ce périmètre, des faubourgs se sont constitués à partir de l’époque moderne appelés » Bary d’Amont et Bary d’Aval » sur le plan cadastral du XIXe siècle.
On peut noter que le « castrum » de La Redorte (château) est mentionné dès 1188. Sans doute se trouvait-il sur la partie sommitale du village, au Nord de l’actuel château.
D’autre part au XVIIIe siècle, un acte de vente signale qu’une » maison d’habitation qui jouxte l’église confronte d’Aquilon la muraille de la ville « .

Grâce à l’essor de la viticulture au XIXe siècle, le village s’est considérablement développé. Cette période vit la construction de nombreuses maisons de maître et maisons vigneronnes, l’érection de l’actuelle Mairie-Ecole (1881), de l’église paroissiale, etc … Du début du siècle on remarque particulièrement les derniers témoins d’une activité villageoise disparue : l’ancienne Pompe-Neuve, une des dernières fontaines mises en service à La Redorte, s’élève sur la place du même nom. La bascule, aux abords de la cave coopérative, s’abrite sous un petit édifice à deux pas. Elle fut utilisée pour la pesée de produits agricoles jusque vers 1970.